La nuit du 12
A l’origine de ce film, il y a un livre écrit par une journaliste, Pauline Guéna, qui a suivi en 2015 et 2016 le quotidien des brigades criminelles de la Police judiciaire de Versailles. De cette expérience, elle a tiré le récit intitulé 18.3 – Une année à la PJ. C’est un livre de 500 pages, un grand réservoir d’histoires vraies parmi lesquelles Dominik Moll en a retenu une, celle d’une jeune fille immolée alors qu’elle rentrait chez elle. Ce qui l’a frappé dans cette histoire n’est pas le crime lui-même, mais le rapport qu’un des policiers entretient avec cette affaire, l’obsession et le trouble que peut provoquer chez un enquêteur un crime irrésolu.
En effet, contrairement aux films policiers traditionnels qui commencent par le crime et s’achèvent sur l’identification de l’assassin, Dominik Moll annonce d’emblée au spectateur que ce qui l’intéresse ici, c’est le mystère, qui dévoile beaucoup plus les mécanismes de l’institution et les ressorts humains que sa résolution. Et plus précisément, ce qui est au cœur de film, c’est le rapport entre les hommes et les femmes. Dans le film, les policiers prennent conscience qu’ils ne sont pas seulement des hommes qui traquent des assassins, mais aussi des hommes dans un monde où ce sont les hommes qui tuent les femmes.
Dominik Moll a choisi de délocaliser cette histoire pour la situer dans les Alpes, afin de sentir la présence oppressante et majestueuse des montagnes, et plus précisément à Saint Jean de Maurienne, ville où se mélangent industrialisation et nature, barres d’immeubles et quartiers cossus.
Le scénario a été écrit par Dominik Moll et Gilles Marchand, également réalisateur de la série Grégory pour Netflix, sur une autre affaire non résolue. Les 2 policiers sont interprétés par Bastien Bouillon et Bouli Lanners, ils forment un duo contrasté et attachant, entouré d’une équipe d’enquêteurs très soudée. Mais les personnages féminins sont aussi très importants : notamment celui de Nanie, la meilleure amie de la victime, joué par Pauline Serieys (qui avait obtenu un César pour son rôle dans Une famille à louer) ou encore la juge incarnée par Anouk Griberg .
Pour son réalisme, ce film a été comparé à L 627, de Tavernier, mais on peut y voir aussi un plaidoyer pour la sauvegarde d’un service public menacé.